La gourmandise, est-ce vraiment mal ?
On a tendance à rire de ces petits excès de nourriture faits par gourmandise : « Rien de grave, je n’ai tué personne ! » C’est vrai, mais les auteurs spirituels invitent ceux qui veulent apprendre à maîtriser leurs désirs à commencer par la nourriture. Car c’est le plus facile. Si tu sais gérer ta bouche, tu sauras gérer tes autres désirs. La gourmandise est le premier des péchés capitaux. Si tu commets celui-là, tu seras entraîné à commettre les autres.
Mais qu’est-ce que la gourmandise ? Ce n’est pas le plaisir d’un bon repas ! Car ce plaisir lié à la nourriture est bon. Il nous pousse à nourrir notre corps et à nous réjouir des bienfaits de la création préparés par des cuisiniers experts. Tout cela est bon ! Louons Dieu et remercions ces cuisiniers généreux.
La gourmandise n’est pas le plaisir lié aux jouissances de la table, mais le plaisir immodéré, le désir désordonné de nourriture. Nous ne sommes pas gourmands quand nous apprécions les bons mets, mais « quand nous prenons de la nourriture avec excès, plus qu’il ne faut pour soutenir notre corps » selon le curé d’Ars.
La gourmandise s’étend au-delà de la nourriture et de la boisson, à des avidités vis-à-vis des choses matérielles et même intellectuelles ou spirituelles. Vouloir acheter absolument et rapidement le dernier CD ou télécharger le dernier film procède de la gourmandise. De même, vouloir lire sans modération un roman ou le journal peut avoir des conséquences négatives, si on doit faire autre chose à ce moment ! Dans l’ordre spirituel, il peut aussi y avoir une convoitise : on peut être tenté de chercher en permanence des consolations spirituelles, des lumières et des joies intérieures, procurées par la relation avec Dieu.
La gourmandise a quelque chose à voir avec l’avidité, le remplissage, et donc la dépendance qui se manifeste par une intolérance à la frustration.
Notre société actuelle matérialiste valorise beaucoup les biens matériels et la jouissance individuelle pour soi et non plus dans l’altérité et le partage. Or la jouissance détourne l’homme de sa finalité. Elle valorise aussi l’accumulation de ces biens plus que la modération en dépit des messages publicitaires. Même l’autre devient un objet que l’on manipule pour soi, pour preuve l’usage du mensonge de plus en plus répandu. L’irruption du virtuel sur nos écrans dissout la frontière entre le réel et l’irréel. La banalisation de la pornographie a quelque chose à voir avec tout ça et nous oblige à être encore plus vigilants pour nous-mêmes et pour notre entourage.